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UNE FEMME

Milady Claudia, qui de son côté pensait beaucoup trop vite pour s’appuyer sur la réflexion, trouva tout simple de rehausser l’éclat de ses soirées, déjà fort brillantes, par l’admission du jeune prince, ou du très-noble Giovanino Rivalto, dès qu’il en eut positivement et ardemment sollicité la faveur. Mariée depuis quelques années à un amiral de distinction toujours absent, elle trompait son demi-veuvage par tous les plaisirs permis dont la richesse fait une habitude à la fois si douce et si impérieuse. Au milieu de l’irritable législation britannique, elle n’avait pas une seule fois encore songé aux terribles conséquences des préjugés, qui préparent des châtiments si sévères et si longs aux erreurs déjà pleines de larmes des femmes de tous les caractères et de tous les rangs ; encore moins formait-elle le vœu triste mais plus humain de lady Montague, qui, depuis son séjour en Orient, osait ouhaiter aux femmes de nos climats, plus tyranniques peut-être cette réclusion d’habitude, ces grilles salutaires, et ces gardiens immobiles qui les protègent contre elles-mêmes, pauvres oiseaux sans ailes, n’ayant de libre que les vifs élancements de l’âme dans ce monde de passage ; ne leur serait-il pas mieux d’être sincèrement enchaînées, que d’étouffer d’esclavage sous la liberté menteuse dont on fait à leur faiblesse un présent si redoutable ? N’est-ce pas mettre en effet ces fragiles sentinelles de leurs 34