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MISS MOLLY.

donnait ses ordres, et laissait parfois tomber tout le poids de sa mauvaise humeur sur Sarah, dont le principal tort, à ses yeux, était d’avoir été traitée si généreusement par le maudit étranger. Miss Molly ne partageait pas sans doute, à l’égard du marin, les sentiments de la vieille Mysie. Cepen dant elle avait peine à se défendre d’un peu de mé—. fiance. Elle ne comprenait pas cette alliance contradictoire du ton trivial et des belles manières, de la richesse et de la pénurie ; alliance dont le marin offrait un exemple frappant. Brusque, emporté, vulgaire avec l’hôtesse, il s’était montré près d’elle honnête, poli, plein de franchise et de dignité. Vêtu comme un homme du peuple, comme un soldat, il avait, pécuniairement, déployé les ressources d’un lord.

Bien qu’elle ne se repentit pas d’avoir agréé ses offres de services, miss Molly résolut pourtant de se tenir sur ses gardes, et de n’agir qu’avec la plus grande circonspection. Durant l’intervalle qui précéda le dîner, le marin, attentif et respectueux, s’efforça, par une conversation agréable et enjouée, de la distraire de ses chagrins ; il parlait comme un homme qui avait vu beaucoup de choses, et parcouru beaucoup de pays ; ses opinions, exprimées en termes élégants, portaient je ne sais quel cachet d’élévation et de noblesse, bien différent du ton qu’il avait pris en entrant dans l’auberge. Miss