Page:Desbordes-Valmore - Le Salon de lady Betty.djvu/363

Cette page n’a pas encore été corrigée
123
LA PRÉCIEUSE.

LA PRÉCIEUSE. 125

ques d’une antipathie décidée, loin de se confirmer par elle dans son dessein d’éloignement, il les eût accueillies au contraire, plein d’espérance, comme les sûrs symptômes d’un amour naïf et vrai qui se révélait involontairement, croyant se cacher. Mais ces deux enfants si parfaitement nés pour s’aimer, et qui s’aimaient en effet de toutes leurs âmes, se désespéraient à plaisir, et ne cherchaient qu’à se prouver une indifférence mutuelle. Jenný, la tête toute exaltée de ses lectures romanesques, s’indignait de la conduite toute calme, glacée et prosaïque de Mortimer. — Ce n’est pas là, se disait-elle

! l’ami que j’ai rêvé. Un homme vraiment

épris n’est pas éternellement une statue de marbre ; fût-il persuadé qu’on lui préfère un rival, l’absence est le dernier remède auquel il ait droit de recourir ; dût-il mourir de jalousie, il ne part pas. Mortimer ne m’aime point, il ne m’a jamais aimée. Et, de son côté, le triste jeune homme se répétait incessamment

·Plus je reste, plus j’accrois l’aversion

que j’inspire à Jenny ; elle ne m’aime pas, elle ne m’aimera jamais ! Elle en aime un autre ! C’est. elle-même aujourd’hui qui prend soin de me le dire, comme si je ne le savais pas assez et de longue main. Mais c’est afin de me chasser qu’elle en use ainsi. Je lui suis un obstacle. Tant que je ne me serai point retiré, Fitz-Gérald aura l’accès moins libre et moins chanceux près d’elle ! Il fau .