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LA PRÉCIEUSE.

LA PRÉCIEUSE. n’y avait point de poëme, point de roman, où le libérateur ne fut l’amant aimé ! D’un autre côté, Mortimer avait contre lui plus d’un désavantage : il ne faisait point de vers et il se moquait sans pitié des poètes azurés. Il avait bien l’air un peu d’aimer ; elle avait deviné cela de longue main ; mais il n’avait pas l’air d’aimer démesurément ; il ne semblait pas dévasté par sa passion. Le pire, c’est qu’il était son cousin, et qu’il avait le consentement et l’appui de M. Forster. Aimer un cousin, et un cousin appuyé de la recommandation des parents ! rien n’était plus vulgaire ; pareille chose ne se voyait jamais dans les romans ni dans les poèmes de l’é cole moderne.

M. Fitz-Gérald, au contraire, M. Fitz-Gérald ! ah ! celui-là ! réunissait tous les droits ou presque tous ! Quel rare génie ! quel poëte ! On avait été déjà chantée par lui dans des strophes magnifiques, et on serait encore chantée dans bien d’autres ! Quelle gloire ! Grâce à lui, peut-être, on serait immortelle ! Qui mais si l’on ett eu que lui pour écuyer le jour de la promenade, peut-être on serait morte ! Fallait-il cependant lui en vouloir si en cette occasion il n’avait pas joué le rôle dévoué de Mortimer. Hélas ! ces êtres à l’âme puissante et vigoureuse étaient si frèles et si débiles de corps ! La préoccupation de la pensée dominait tellement chez eux la matière ! Ce pauvre Fitz-Gérald surtout était -