LA PRÉCIEUSE. la meilleure partie de leurs journées et vivaient dans une parfaite intelligence. Mortimer se montrait constamment attentif et empressé. Il était réellement fort aimable et très-formé pour un garçon tout frais sorti du collége. Jenny, de son
côté, recevait avec beaucoup de bonne grâce ces prévenances. Elle aimait vraiment au fond son cousin. Elle lui trouvait de la vivacité, de l’esprit, le cœur élevé, une noble franchise ; il lui semblait bien fait et de belle mine. Mais ce n’était qu’une amitié vive, fondée sur l’estime et l’appréciation de qualités recommandables ; — ce n’était qu’une amitié presque fraternelle qu’elle lui accordait lorsqu’elle venait à s’interroger et à analyser ses sentiments. Mortimer différait bien en effet de l’homme idéal qu’elle s’était créé depuis que son affiliation aux mystérieuses rêveries du club azuré lui avait monté la tête et obscurci le jugement. Cependant le jeune homme avait eu, on se le rappelle, une yeine de bonheur chez miss Appleby. Il avait, grâce à quelques mots de galanterie, notablement réussi près de la section féminine de nos bas bleus. Ce succès ne lui avait pas nui non plus près de Jenny. Elle en avait été fière involontairement. Mais à une soirée littéraire que donna miss Coates, il se conduisit de façon à détruire tous les avantages que lui avait valus son premier triomphe. La conversation avait roulé longtemps sur mille 1
