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LA PRÉCIEUSE.

LA PRÉCIEUSE. 17

se soustraire à la contagion. Or, entre toutes les personnes qui avaient le don de lui plaire par leur jargon empoulé, M. Fitz-Gérald figurait en première ligne. Elle l’admirait comme un être sans pareil, et quand cet astre venait à luire près d’elle elle subissait en quelque sorte l’attraction de ses rayons. Ses phrases devenaient soudain pompeuses et retentissantes, son ton décisif. Elle critiquait avec assurance. Elle était en proie à une sorte d’enthousiasme dont il eût été difficile d’expliquer la cause, mais qui avait des effets légèrement ridicules. C’est dommage ! miss Jenny était, au fond,. une bonne et simple fille sans prétention. Par moment, lorsqu’elle était livrée à elle-même, lorsqu’aucun contact de bel esprit ne la touchait, lorsqu’aucune nuance de la couleur bleue ne brillait autour d’elle, oh ! dans ces précieux intervalles, elle était toute naturelle et charmante. Au lieu de grimper sur des échasses pour courir à pas immenses après l’esprit, elle allait doucement son chemin, la démarche gracieuse, excellant dans la conversation aimable et familière. Que ne se contentait-elle de ces humbles mérites, qui la rendaient si adorable en famille, en un petit cercle resserré d’amis ! Mais non, elle se trompait de bonheur ! Elle mettait sa joie à paraître au milieu d’une assemblée que la lumière de son intelligence pût éblouir. Elle avait l’ambition de devenir l’une des étoiles lumi,