Page:Desbordes-Valmore - Le Salon de lady Betty.djvu/139

Cette page n’a pas encore été corrigée
131
UNE FEMME.

L’ALBUN DE LADY BETTY. 131

coupé que lord Brownsberry faisait atteler tous les jours afin de tenir en haleine ses chevaux de pur sang. Sa santé délicate exigeait qu’elle respirât le grand air ; il lui fallait s’asseoir sur le siége près du glorieux fashionable qui prenait plaisir à mener lui-même à la campagne ses grandes voitures, comme à la ville sés tilburys et ses tandems ; on avait plus de mal encore à venir à bout des soirées que des matinées. Lady Barbara me priait souvent de l’accompagner à la promenade. Quant à lady Betty, elle n’eut pas osé s’aventurer à se mouiller les pieds dans le gazon humide ; nous l’abandonnions donc à la merci du noble lord, pour qui la marche était un divertissement vulgaire tout à fait indigne d’une personne distinguée et à la mode. La bonne vieille lady Layton n’avait pas néanmoins discontinué ses siestes ; lorsque Barbara et moi nous rentrions au salon, nous y retrouvions bien Betty et son illustre parent éveillés ; mais je ne sais comment il advenait qu’ils étaient toujours sans lumière ; on n’avait jamais préparé le thé, et cependant il était parfois très-tard. J’avais alors des accès de spleen éloquent que chacun admirait ; je m’en prenais au crépuscule, à la lune et aux étoiles, et les traitais de la manière la plus outrageante ; je n’épargnais pas la nuit, dont je chantais naguère si poétiquement le tendre mystère. A présent j’accusais ses complaisances honteuses ; je lui