Page:Desbordes-Valmore - Huit femmes, 1845.pdf/477

Cette page a été validée par deux contributeurs.
132
HUIT FEMMES.

chait sur Sarah des regards si douloureux, si pénétrans, qu’elle ne pouvait les soutenir. Quand ils se parlaient, leurs voix étaient si tendres qu’il semblait que leur ame venait de se dévoiler toute entière, et des paroles, indifférentes pour les autres, devenaient un échange des plus tristes aveux. M. Primrose voyait tout, et hâtait de tout son pouvoir une séparation qu’il redoutait pourtant ; mais, fidèle à la promesse que son fils avait obtenue de lui, il songeait à la remplir sans en prévoir encore le moyen. Emmener Sarah lui paraissait impossible pour le repos de tous ; la laisser dans l’île, sans état, sans appui, n’était à ses yeux qu’une action barbare qui révoltait sa raison : ainsi tous trois se taisaient et consumaient les jours dans une égale incertitude.