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La famille Desbordes (b) vivait du labeur du père, peintre d’armoiries et d’ornements d’église, lorsque la Révolution, peu propice à ce genre de métier, apporta la ruine au modeste foyer. Heureusement, l’âge de Marceline la protégeait contre les soucis et les terreurs. Ses parents, ses sœurs, ses amies, Marie-Rose et Albertine surtout, suffisaient à son cœur.

« Mon jeune âge m’a fait deux amies,
Dont l'une est partie avant moi,
Parfum de mes fleurs endormies ;
L’autre fleur vivante, c’est toi !
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Nous allions, comme trois colombes.
Effleurant à peine le blé ;
Et vers le doux sentier des tombes
Le triple essor s’est envolé.»

C’est en ce moment que se lève dans sa vie, comme une aube première de l’amour. Était-ce de l’amour ? On voudrait se servir d’une expression plus idéale pour désigner le sentiment qui parfume cette pure idylle, racontée par elle-même dans une page exquise, baignée de mélancolique douceur :

« J'étais sur la porte de ma mère, quand il ne faisait plus ni jour ni nuit. Je l’entrevoyais dans ce voile doux qui couvre les rues à l’heure du soir. Ses pas se pressaient, sa tête blonde et bouclée se dirigeait comme une tête d’ange vers notre maison. Il sortait du cimetière qui bordait