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PRIÈRES.

La misère au milieu du grand Éden ! méchante
Au passereau qui vole, au rossignol qui chante,
À la fleur qui veut naître et qui n’ose éclater,
Au germe qui veut vivre et ne peut palpiter ;
L’âpre misère enfin, cette bise inflexible,
Qui détruit lentement ce que Dieu fit sensible ;
Dojut le pâle baiser gèle l’arbre et le fruit ;
Elle pousse ma porte, où s’élève sans bruit
La prière toujours allumant son sourire,
Quand l’ange gardien passe et m’aide à la mieux dire.
Moi, j’ai toujours au cœur le répit d’un tourment,
Quand ma pensée à Dieu s’envole librement !

Allez ! je vous devine, et j’ai ma soif déçue,
Ma douce royauté vainement aperçue ;
J’ai mes chants commencés qui s’écoulent en pleurs ;
Mes épines au front que je croyais des fleurs !
L’amour m’a fait présent d’une tendresse amère,
Du doux remords d’aimer et d’oser être mère.
En regardant pâlir des fronts purs et charmans,
On a peur d’attirer sur eux ses châtimens ;