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PRIÈRES.

Vos poètes ont mis leurs vers les plus touchans
Sur ce clavier qui pleure et prie avec des chants ;
Et s’il était… pardon ! permis de croire aux fées,
À ces reines de l’air dans l’Orient rêvées,
On se prendrait, près d’elle, à croire parmi nous
Une fée en exil et souvent à genoux.

Ô reine ! relevez cette gloire timide
Qui traversa des cours l’atmosphère splendide,
Quand la belle fortune avait de son chemin
Fait le pavé facile, et lui tenait la main.
La fortune a tourné ; le temps vole ; son aile,
Qui poursuit tout bonheur de rancune éternelle,
De cette harmonieuse a fait pencher le front
Tout pâle, et l’a couvert d’un indigent affront.
Celle qu’on appelait la charmante, l’heureuse,
Monte à pieds déchirés sa cime rigoureuse.
Dans le travail obscur où s’éteignent ses yeux,
Qu’elle obtient chèrement ses ailes pour les cieux !
Que d’hymnes elle jette aux échos de la vie,
Pour un rayon du feu que sa tristesse envie !