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des ouvrages de Plaute ou de Molière, c’est y introduire la subversion sous prétexte d’y faire régner l’harmonie. Vous m’offrez une pièce aussi savamment conduite qu’Héloïse Paranquet ; je l’accepte, mais je dis : « Malgré des conformités mensongères, ce n’est plus une œuvre d’Aristophane que j’ai sous les yeux. » Aristophane avec son désordre me semble plus original qu’habillé à la mode de Térence. Et vous aussi, vous imitez nos pseudo-classiques, vous accommodez l’antique au goût français, vous coupez les griffes du lion, vous peignez sa fauve crinière.

Je ne reconnais donc pas Aristophane dans l’ordonnance de ce Plutus rajeuni. Vous me l’avez fait trop habile, trop expert dans les roueries du métier, ce poëte des temps heureux où l’on avait assez de génie pour se passer encore de talent. Ce ne serait rien encore si ce premier anachronisme n’en amenait d’autres. Les erreurs sont comme les hirondelles en automne : elles vont toujours en compagnie. La plus grave de ces infidélités vous est chère sans doute, comme une invention personnelle dans une œuvre de seconde main. Je veux parler de l’intrigue amoureuse et sentimentale dont vous avez compliqué l’action purement comique du Plutus.

Vous supposez que Myrto, fille de l’avare Chrémyle, aime Bactis, un jeune Scythe de noble race, que les hasards de la vie antique si inquiétée, si précaire, ont jeté parmi les esclaves de son père. Elle avoue son amour à Bactis, le suit pendant toute la pièce d’une vigilante tendresse et l’épouse au dénoûment, après