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imprévoyante, l’œuvre meurtrière que J. Claretie marque de traits fortement imprimés. Cette Terreur blanche, c’est le meurtre déchaîné sur la France ! On eût dit la fête des fous de l’assassinat. Figurez-vous un 2 septembre royaliste qui dure jusqu’au milieu de 93 et reprend de temps à autre sous le Directoire. Partout les patriotes sont égorgés, Girondins ou Montagnards, réconciliés dans l’universelle tuerie. Un des juges de Carrier est mis en pièces à son retour dans son village de l’Isle ; Gonchon, l’ami de Roland, ne se soustrait que par la fuite au carnage en permanence à Lyon. « Du sang partout, » disent E. et J. de Goncourt dans leur Histoire de la Société française pendant le Directoire.

Voyez les prisons, elles regorgent. Les compagnies de Jésus et du Soleil, les bandes de Lestang, de Job Aymé, sauront désemplir ces prisons. A Lyon, c’est l’incendie, à Aix, la canonnade, à Marseille, l’ensoufrement, à Beaucaire, les flots de chaux vive qui précèdent le carnage. A Tarascon, la mort des détenus précipités de la tour sur les pointes des rochers est un spectacle pour les belles royalistes, aux applaudissements cadencés.

Au moins la République a-t-elle livré au bourreau ses plus odieux proscripteurs. Le royalisme renaissant couronnait de fleurs les assassins de Marseille et de Lyon et leur rendait publiquement les honneurs du triomphe. Et pendant qu’à Sisteron, à Barbantane, à Saint-Étienne, à Montélimart, à Bourg, on fusillait les vivants sur les cadavres encore chauds, que l’on fendait