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publique auxquelles la vogue et la surprise n’ont rien à prétendre, et qui sont, pour le véritable écrivain, [comme ces armes d’honneur décernées, en l’an III, à des généraux sans titres, sans rubans et surtout sans dotations.

Plus d’une fois le jeune historien, dans les préliminaires de son travail, a pu se sentir découragé en songeant à ses devanciers qui avaient assumé le récit des grandes années révolutionnaires et pris en quelque sorte la fleur et la flamme d’un sujet qui semblait épuisé. Plus d’une fois il a pu s’appliquer ces paroles de Tacite :

« On ne doit pas comparer ces annales aux mo « numents qu’ont élevés les historiens de l’ancienne

« République Une vaste et libre carrière s’offrait

« à leurs récits. La mienne est étroite et mon tra « vail sans gloire Toutefois, il ne sera pas inutile

« d’observer des faits, indifférents au premier aspect, « mais d’où l’on peut souvent tirer de grandes le « çons (1). »

Néanmoins J. Claretie ne s’est pas découragé. Suivant le précepte de l’ami de Pline, il a su comprendre que les plus tristes exemples renferment au moins des enseignements, et surtout qu’au sortir d’une action de drame et d’épopée, l’imbroglio thermidorien ne pouvait manquer d’offrir des scènes intermittentes d’héroïsme et de grandeur. C’est d’après cette vue qu’il a composé son remarquable ouvrage, et les résultats ne l’ontpas trompé : car d’utiles enseignements se dégagent

(1) Annales, liv. IV, ch. XXVII.