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de la deuxième pythique, où le poëte ébauche en vers admirables le type inquiet d’une mélancolique en pleine mythologie, la jeune Coronis « éprise des choses absentes. Combien d’autres sont comme elle ! » Oublierons-nous ce recueil des Odes anacréontiques, qui près des molles effusions d’une songerie enivrée de toutes les délices sensuelles nous suggère des traits aussi pénétrants que ceux-ci : « Le temps ailé fuit « comme la roue d’un char, et, nos os dissous, nous « ne sommes qu’un peu de cendres… Je crains le Tar « tare, et l’abîme d’Hadèsest horrible ; la descente est « affreuse, et, une fois descendu, nul n’en revient. » Dans Aristophane rappelons les chœurs des Oiseaux. Dans Sophocle signalons YAjax et les Trachiniennes. Je n’y recueille que deux citations :

« L’ignorance est le plus heureux état de la vie, a jusqu’à ce que l’expérience fasse discerner la joie et « la douleur. (1) »

« Nul ne peut connaître avant la mort d un homme « s il. a été heureux ou malheureux. (2) »

On trouverait rarement de ces rêveries soudaines dans Euripide ; chez ce tragique étrange, si poëte et si sophiste à la fois, le pathétique abonde et la tristesse éclate plutôt que la mélancolie. La Créuse d Ion, Hécube, la Macarie des Héraclides, justifieraient au besoin mon assertion. Cependant jamais une ode entière dePindare, une tragédie de Sophocle, ne présenteraient dans leur ensemble le caractère de la mélancolie.

(1) Ajax.

(S) Trachiniennes.