Page:Des Essarts - Les Voyages de l’esprit, 1869.djvu/222

Cette page n’a pas encore été corrigée

et large. La première formule qu’elle pose supprime toutes les formules restrictives et pédantesques. Ce n’est rien que & liberté dans l’art ». Voilà ce qui assure à Victor Hugo une originalité de critique non moins grande que son originalité lyrique et dramatique. C’est d’avoir fondé son esthétique sur la ruine de toutes les règles factices, de tous les procédés d’école, de toutes les conventions. Par là, ne fût-elle pas rehaussée par les splendeurs du style, de la Préface de Cromwell à William Shakespeare, cette esthétique serait durable. « L’Art est libre. » Quelle parole plus féconde, plus conforme àla Raison, a jamais été jetée dans le monde ? Quel retentissement elle a eu, quels résultats elle a produits depuis trente ans ! Toute œuvre personnelle et vivante a répondu à ce cri de liberté. Tout critique supérieur s’est imposé comme un devoir de respecter la franchise de l’inspiration, et de substituer la complète intelligence des œuvres à l’ancienne confrontation avec ces poétiques qui ne prévoient pas les poëtes. Une révolution a donc été faite dans l’Art parmi ceux qui créent et parmi ceux qui jugent, en vertu de quatre ou cinq principes inaugurés, proclamés, rajeunis sans cesse par l’initiateur Victor Hugo.

Ces principes vraiment impérissables, compris dans la vaste formule de liberté, peuvent être ainsi énumérés : N’admettre dans l’art ni perfectionnement ni décadence ; s’attacher aux beautés des chefs-d’u uvre en négligeant leurs défauts, interdire l’imitation, interpréter la nature sans la reproduire servilement… Principes qui se retrouvent mieux exprimés, mieux