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adolescent. Mais Victor Hugo avait dans le cœur un bien autre rêve. Ce n’était pas de la Dame au vert laurier qu’il était le plus épris.

L’amour avait traversé sa vie. Ce n’était pas un de ces sentiments factices ou vulgaires qui usurpent ce nom divin. C’était cet amour pudique et passionné, impatient de liens sacrés, avide d’éternité, qu’inspire une sœu ; 1 de Juliette et qui fait du jeune homme un frère de Roméo. Cette tendresse ingénue et forte du fiancé pour la fiancée, V. Hugo l’éprouvait depuis plusieurs années pour la fille d’un des plus vieux amis des es parents, Mlle Adèle Foucher. Ces jeunes gens, ces enfants avaient été séparés dans leurs naissants projets par la prudence des deux familles. La destinée du poëte adolescent était alors si incertaine. C’était à lui de conquérir son rêve. Il y réussit vaillamment, après quelques années de travail incessant et de pauvreté noblement subie. Le jeune poëte déjà célèbre, ami de Soumet, pupille de Chateaubriand, et qui avaitLamennaispour confesseur et pour père spirituel, souffrit avec le sourire aux lèvres et la foi au cœur toutes les affres de la pauvreté parisienne. Il fut Marius, le Marius des Misérables, vivant au jour le jour, pendant un an, mais radieux, électriséf, transfi. guré, quand, au détour d’une allée dans le doux jardin du Luxembourg, il entrevoyait de loin celle qui dans son œuvre devait s’appeler Ethel, Dôna Sol, Regina et hier encore Cosette.

Pendant cette saison de lutte laborieuse et d’amoureuse attente, V. Hugo n’avait plus pour le raffermir