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Duclos ; mais d’un grand poëte, nullement. Quelle mesure observera-t-il pour parler de lui et de ses mérites ? Quelle proportion établira-t-il entre l’arrangement et la vérité pure ? En pareil cas, la modestie ne paraîtra qu’hypocrisie, l’orgueil franchement proclamé deviendra bientôt insupportable et cruel. Quant à la question de sincérité, voilà le périlleux problème. L’écrivain veut-il se manifester tout entier comme Rousseau ? Il livrera au public des faiblesses inséparables de l’humanité, mais qui, chez les grands hommes, s’agrandissent et servent d’arguments éternels à la race opiniâtre des détracteurs. Il est des calomnies qui traversent les siècles. Ne vaut-il pas mieux les prévenir dans leur essor ? Telle est l’alternative : ou laisser échapper des aveux regrettables, ou multiplier des désaveux répréhensibles. Qu’auraient perdu Châteaubriand et Lamartine à garder le silence ? Rien. Ils y auraient gagné de ne jamais découronner leur front de l’auréole poétique. Que n’ont-ils trouvé "sur leur route ce précieux témoin que la plus sainte des affections a placé auprès de Victor Hugo pour satisfaire à. la fois notre curiosité avide de détails instructifs et pour épargner au poëte aimé cette ostentation rebutante ou ce mensonge de toute la personne auxquels les condamnent souvent les autobiographies.

Dans ce livre, écrit aux côtés de Victor Hugo par un autre lui-même, mais par un autre que lui, il y a donc toute la modestie, toute la discrétion que l’on peut désirer. Il y a aussi toute la sincérité que l’on peut réclamer. Rien qui soit un document n’est omis. Ne