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quence assez aisée, il le regagne en calme, en sérénité, en véritable grandeur.

Pèlerin de la poésie religieuse, Leconte de Lisle avait donc commencé par la Grèce son voyage autour du monde, voyage assez semblable aux courses lointaines des Pythagore et des Platon qui allaient chercher la vérité éparse au lieu d’attendre superbement son éclosion dans leur âme. Qu’est-ce que l’Hellénisme ? La loi de l’équilibre présidant à la formation des dogmes, les forces divinisées, la beauté reine, une aristocratie héroïque planant sur les républiques humaines, au-dessus de ce chœur olympien et de son divin chorege, une main mystérieuse qui s’appesantit par intervalle et qu’Eschyle appelle la fatalité ; enfin, dans le lointain, un jeune autel où Prométhée distingue la forme du dieu inconnu !

Dans cette conception, rien de terrible, rien de monstrueux ; tout est lumière, calme, impérissable harmonie. Cette lumière, cette harmonie, ce calme, se reflétèrent dans les poëmes de Leconte de Lisle, miroir infaillible où le vieux Zeus, reclus bien loin dans quelque antre de Crète, se reconnaîtrait sans hésiter, avec une auguste reconnaissance pour le dernier des rhapsodes. Mais à la fin de ce volume, quand on lut ces mots : « Curya, Bhaghavat », on se sentit transporté dans une autre mythologie et l’on put se demander si les qualités déployées par Leconte de Lisle dans son évocation de l’hellénisme n’excluaient pas les qualités toutes différentes que réclament les mythes orientaux. On put se convaincre alors de la merveilleuse