Notre départ de Moscou, malgré toutes les pertes que nous avions subies, était loin encore de ressembler à une déroute. Nous ne demandions pas mieux que de quitter cette ville en ruines, où chaque jour des explosions étaient à craindre et où il n’y avait pas d’ennemis à combattre.
L’empereur, d’après ce qu’on nous disait, avait l’intention de poursuivre Kutusof sur la route de Kalouza, puis de revenir dans la ville conquise pour y passer l’hiver. Il avait même été question de laisser Mortier au Kremlin avec une garnison ; mais la ruine de cette forteresse dérouta toutes nos prévisions.
Nous voilà donc partis, musique en tête, havre-sacs et porte-manteaux remplis de vivres, Napoléon lui-même emportant parmi ses bagages la grande croix de Saint-Ivan, qu’il destinait au dôme des Invalides.
Mais notre joie fut de courte durée !