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constituer une société sans esclaves ; les économistes de la réaction s’imaginent qu’une société ne peut subsister sans prolétaires ; quelques républicains semblent croire que l’on peut constituer la société nouvelle sans admettre les femmes à l’égalité civile et politique ; et même l’un de nos publicistes les plus célèbres veut exclure la femme des champs du travail.

Mais les clartés de la science sociale dissiperont ces erreurs. Nous croyons avec une foi et une conviction profondes que c’est ce titre de mère, au nom duquel on veut exclure la femme, qui lui impose le devoir et lui donne le droit de veiller sur l’avenir de ses enfants, non-seulement comme nourrice et comme berceuse, mais comme mère ; et de réclamer pour eux, sans distinction de sexe, la vraie liberté, c’est-à-dire le complet développement et le libre exercice de toutes leurs facultés ; elle doit participer à l’administration des intérêts du travail et apporter, dans l’économie politique, la science et la pratique de l’économie domestique, pour établir une plus équitable répartition du travail, des instruments et des produits du travail, elle doit y apporter l’intervention de sa prévoyante sollicitude maternelle, afin qu’il n’y ait plus de souffrants ni d’opprimés.

Il ne faut donc pas l’exclure du travail ni de la participation à l’administration des intérêts du travail, car la femme, comme l’homme, ne peut s’affranchir avec dignité que par le travail ; et, je l’espère, bientôt il n’y aura plus d’autre gouvernement que le gouvernement des travailleurs, d’autre politique que celle des intérêts du travail.

Et l’on effacera du front de la femme tout stigmate d’indignité civile et politique, afin que la femme, la mère des citoyens libres, ne cache plus son front humilié dans le giron de l’Église, et qu’elle se relève, libre et citoyenne.

» Salut fraternel,


 » Jeanne Deroin. »