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ève.

basée sur des principes de raison, des principes immuables et éternels, et qu’elle pût les soutenir, à l’occasion, par les ressources qu’offrent une intelligence cultivée et un cerveau qui pense et réfléchit, elle n’accepterait pas volontiers ces confessions cyniques, puisqu’elles sont faites sans aucun repentir, et qu’elles renferment les transgressions à la loi que scrupuleusement elle observe. Elle verrait là un défi porté à sa morale, une sorte d’insulte.

Mais tel est l’effet essentiellement démoralisateur de l’inégalité des deux sexes, que rien en elle ne se révolte, et que l’homme, de son côté, se croit assez grand pour se dispenser des mœurs pures, et trouve tout naturel que la femme s’y soumette en raison de son infériorité.

On voit que cette question est grosse de contradictions. Bien que nous les ayons déjà fait ressortir dans notre précédent discours, nous ne nous lasserons pas d’y revenir. Cette situation et cette éducation subalternes de la femme diminuent les chances de bonheur du ménage. Toute une sphère d’idées est mise à l’écart. Chacun y perd : la femme se rétrécit l’esprit, et l’homme ne modifie pas le sien.

La femme a souvent une foule de bonnes raisons à faire valoir ; il est regrettable que, faute d’une instruction approfondie, elle manque de puissance pour les exprimer.

Un paradoxe, un argument spécieux la déconcerte. Dans la discussion, elle a presque toujours le dessous, bien que soutenant une bonne cause. Le mari est vainqueur à peu de frais, même s’il a moins d’esprit naturel que sa femme.

Du reste, lui-même sent bien la faiblesse de son triomphe et en est médiocrement satisfait. Son amour-