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dans l’humanité

toujours pour la femme utile. Aussi, quel gâchis ! que de folies, que de contradictions, que d’inconséquences ! Il est curieux de noter quelles vertus on a successivement demandées à la femme. Nous le verrons en remontant à une époque très éloignée.

D’abord nous avons les lois de Manou. Au livre deuxième, nos 213 et 215, Manou dit : « Il est dans la nature du sexe féminin de chercher ici-bas à corrompre les hommes, et c’est pour cette raison que les sages ne s’abandonnent jamais aux séductions des femmes… Il ne faut pas demeurer dans un lieu écarté avec sa mère, sa sœur ou sa fille ; les sens réunis sont bien puissants, ils entraînent l’homme le plus sage. » Oui, Manou a écrit cela. Quelle société fréquentait-il donc ? Je passe au livre troisième, nos 55 et suivants : les prescriptions de Manou sont toutes en faveur de la femme : « Les femmes mariées doivent être comblées d’égards et de présents par leurs pères, leurs frères, leurs maris et les frères de leurs maris… Partout où les femmes sont honorées, les Divinités sont satisfaites ; mais lorsqu’on ne les honore pas, tous les actes pieux sont stériles. Toute famille où les femmes vivent dans l’affliction ne tarde pas à s’éteindre. » Il y a au moins 50 lignes sur ce ton. Quand il écrivait tout cela, le bon Manou avait-il l’intelligence bien nette ? Que faisait-il de la logique ? S’il pense que la femme est un être assez pervers pour ne pouvoir demeurer seule avec son frère, avec son fils, avec son père sans le corrompre, est-il bien raisonnable de tant respecter la femme et tant l’honorer ? J’arrive au livre cinquième et je trouve au no 154 : « Quoique la conduite de son époux soit blâmable, bien qu’il se livre à d’autres amours et soit dépourvu de bonnes qualités une femme vertueuse doit constamment le révérer comme un Dieu. » C’est de plus en plus incohérent. Je vous assure que je n’invente rien ; je me borne à citer textuellement.