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dans l’humanité

Et Richon et de Thonnerins, ce père de famille, ce vieillard libidineux qui se permet, après mille folies, peu excusables à son âge, de faire des leçons de morale lorsqu’il devrait en recevoir ? Ces honnêtes gens-là sont au niveau des salons frelatés qu’ils hantent de préférence aux autres.

Cependant M. Dumas fils ne devait pas s’en tenir là, il allait créer tout d’un bloc une femme sérieuse, une femme à idées. Oh ! fis je en regardant l’affiche, une femme sérieuse fabriquée par l’auteur de Diane de Lys et du Demi-Monde, que peut-elle bien être ? [1]

Les Idées de Madame Aubray, suivant les théories de M. Dumas fils, ne pouvaient être que saugrenues, une femme ne pouvant avoir des idées sages et rationnelles. En effet, je ne m’étais pas trompée, les idées de Mme Aubray ne sont que les idées de défunt M. Aubray. Il paraîtrait qu’en mourant, cet homme d’élite, — dans toutes les œuvres de Dumas fils, il y a des hommes d’élite, pour nous consoler, sans doute, d’en rencontrer si peu dans la réalité — cet homme d’élite, dis-je, a fait de son bagage intellectuel sa femme légataire universelle.

Or, ces idées de feu Aubray forment une mixture nébuloso mystico-chrétienne. Pour être juste, il y a du bon ; par exemple, morale identique pour les deux sexes. Puis, prescription plus contestable, le pur est dans l’obligation de s’unir à l’impure pour lui faire recouvrer, à son contact, sa blancheur première. Avouons que c’est excessif. Le pur, c’est le fils Aubray qui, grâce à sa mère, a hérité des idées de feu son père. L’impure, c’est Jeannine, la créature d’instinct,

  1. À cette époque, M. Dumas fils n’avait pas fait encore son évolution, et il était le contempteur acharné de toute émancipation féminine.