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dans l’humanité

jours supputant les dépenses qu’occasionne une femme coquette. Cette réflexion en appelle une autre qui est suscitée par l’élimination systématique de l’amour dans la tragédie antique. Il n’en est parlé que pour mémoire par quelque personnage chargé d’édifier les spectateurs sur les événements précédents, dont la connaissance est nécessaire à l’intelligence de la pièce ; et la plupart du temps, c’est le chœur qui en a la mission. Nulle part une scène d’amour ; et ce sont principalement les héros du drame qui semblent rester étrangers à la fougue de ce sentiment, le plus violent de tous. Ici, l’orgueil masculin paraît s’accuser en se refusant à avouer qu’il est soumis à l’empire du fils de Vénus.

Certains critiques, je le sais, ont expliqué cette éviction par le caractère sacré que revêtaient ces œuvres dramatiques destinées exclusivement, à l’origine, à être jouées dans les cérémonies religieuses. Mais c’est là la plus mauvaise raison qu’on puisse donner, l’amour tenant une des premières places dans le panthéon olympien. Vénus, rangée parmi les douze grands dieux, avait ses autels et ses temples dans toutes les villes de Grèce ; et son action sur les faits et gestes des mortels était considérable, puisqu’elle l’exerçait également sur les divinités ses collègues.

La base de toute théogonie antique, aussi bien orientale qu’occidentale, a un caractère essentiellement générateur. Cause fondamentale de ce qui devra suivre, elle n’est toujours que l’union ou syzygie de deux principes de genre différent dont le produit est un facteur nouveau.

« C’est l’Amour, le plus beau des immortels, suivant Hésiode, qui était au commencement. Il n’y avait pas de dieux avant que l’Amour eût mêlé toutes les choses. Mais de cette pénétration intime furent engendrés les dieux immortels. » De là l’extension du culte