Page:Deraismes - Eve dans l humanite - Les Droits de l enfant.pdf/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.
96
ève

malgré la marche des siècles et les progrès de la civilisation, se perpétuera dans les différentes œuvres. Ce sont naturellement les Grecs qui fournissent les premiers spécimens.

Ceux-ci, avec Eschyle, Sophocle, représentent le caractère dogmatique. Les personnages nous expliquent la genèse des dieux et leurs faits et gestes. Là, nous rencontrons, nettement exprimée, la déclaration solennelle de la supériorité du principe mâle.

Dans les Euménides d’Eschyle, lorsque Oreste, meurtrier de sa mère, fait à Delphes, puis à Athènes, une sorte de pélerinage pour consulter l’oracle, et que le chœur, le sachant parricide, veut sa condamnation, Apollon répond qu’il ne peut y avoir parricide, « parce que, dit-il, ce n’est pas la mère qui engendre ce qu’on appelle son enfant : elle n’est que la nourrice du germe versé dans son sein ; celui qui engendre est donc le père.

« La femme, comme un dépositaire, reçoit le germe et, quand il plaît aux dieux, elle le conserve.

« La preuve de ce que j’avance, c’est qu’on peut devenir père sans qu’il soit besoin de mère : témoin cette déesse, fille de Jupiter, roi de l’Olympe. Elle n’a point été nourrie dans les ténèbres du sein maternel et quelle déesse eût jamais produit un pareil rejeton ? »

Minerve, plus loin, ne fait que corroborer cette opinion.

« Je n’ai pas de mère à qui je doive la vie ; ce que je favorise partout, c’est le sexe viril ; je suis donc toute pour la cause du père… »

Je m’empresse de faire remarquer, ici, que l’auteur, étant un homme, fait parler la déesse suivant ses idées personnelles.

Cette répudiation de toute filiation et même de tout lien avec le sexe féminin, faite par Minerve, personni-