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empoisonnées. Les préparatifs terminés, on fit procession solennelle à la montagne des Oliviers. Puis le 14 juillet 1099, à l’aube, un assaut furieux fut livré. On se battit tout le jour avec un acharnement extraordinaire, mais sans résultat. Le lendemain, l’assaut recommença. On Parvint à pousser près des murs de hautes tours roulantes, munies de pont-levis. La tour de Godefroid de Bouillon s’approcha d’abord : aussitôt que le pont-levis fut abattu sur les remparts, deux frères de Tournai, Léthalde et Engelbert, s’élancèrent les premiers sur les murs. Godefroid les suivit, Au même moment, sur un autre point, Robert de Jérusalem et l’illustre héros normand Tancrède parvenaient aussi aux remparts. La ville fut bientôt prise. Alors commença un effroyable égorgement : Juifs et Musulmans tombèrent en foule sous les coups des chrétiens en fureur. Le sang coulait à flots ; à la mosquée d’Omar, il arrivait jusqu’au poitrail des chevaux. Ces déplorables excès durèrent huit jours : mais Godefroid n’y eut point de part : la ville prise, il était allé, pieds nus, se prosterner sur le tombeau du Christ.

Dix jours plus tard, les chefs croisés réunis décidèrent d’élire, comme roi de Jérusalem, le plus sage et le plus brave d’entre eux : Godefroid fut désigné d’une voix unanime, mais il n’accepta que le titre d’avoué et baron du Saint Sépulcre : « À Dieu ne plaise, dit-il, que je porte une couronne d’or où mon Sauveur n’a porté qu’une couronne d’épines ! »

À peine élu, le nouveau roi dut reprendre les armes : le 15 août 1099, il attaqua dans la plaine d’Ascalon, une nombreuse armée égyptienne, et remporta sur elle une éclatante victoire.

Alors les croisés reprirent le chemin de l’Europe, et Godefroid resta en Terre Sainte avec trois cents chevaliers. Des succès brillants étendirent peu à peu le royaume naissant. Mais Godefroid s’occupa surtout de l’organisation intérieure de ses États et divisa en trois cents fiefs, qu’il distribua à ses chevaliers.

Malheureusement, son règne fut éphémère. Au retour d’une expédition dans le Nord, l’émir de Césarée, qui s’était soumis à son pouvoir, lui offrit de beaux fruits, empoisonnés dit-on. Bientôt après, Godefroid fut incommodé ; le mal empira, et cinq semaines plus tard, le héros expirait à l’âge de trente-neuf ans. Il eut un digne successeur dans son frère Baudouin Ier.