Page:Deprez - Petit cours d'histoire de Belgique, 1916.djvu/58

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 56 —

métans ! Mais Bohémond, prince de Tarente, parvint à corrompre l’émir Phiroüs. Par une nuit sombre d’orage, tandis que le tonnerre grondait, que les éclairs brillaient, les chrétiens s’approchèrent sans bruit de la ville. Des échelles de corde leur furent jetées du haut des murs. Les croisés escaladèrent les remparts et la ville fut prise. Dix mille hommes furent massacrés.

Trois jours plus tard, les chrétiens y étaient asiégés à leur tour. Le sultan de Mossoul, Kerbogd, arrivait en effet avec une armée innombrable, et il investit la ville. Les croisés sans vivres subirent encore une fois les plus horribles souffrances. Torturés par la faim, accablés par les muladics, ils tombèrent dans un morne désespoir, tant leur perte paraissait inévitable. Mais un jour, un prêtre de Marseille, nommé Pierre, se présente devant les chefs des croisés. Saint André, leur dit-il, lui a révélé le lieu où se trouve cachée la lance qui a percé le flanc du Sauveur sur la croix. On fouille, un trouve une lance en effet, à l’endroit désigné. Cette découverte relève tous les cœurs, l’enthousiasme et l’espérance se raniment. Pleins d’une confiance invincible, les croisés sortent de la ville, en chantant les psaumes ; ils fondent sur les infidèles avec une impétuosité irrésistible et remportent une victoire complète : cent mille Musulmans périrent ! Ce succès prodigieux et incompréhensible ne parut expli-1 cable que par l’intervention divine.

Cette fois la route de Jérusalem était libre ! Cependant la peste décima six mois encore les chrétiens dans Antioche. Quand ils s’éloignèrent enfin de ce séjour funeste, ils n’étaient plus que cinquante mille combattants ! Les croisés traversant alors les riches vallées du Liban, foulèrent bientôt le sol de la Terre Sainte. À mesure qu’ils parcouraient ces lieux célèbres, une ardeur nouvelle les enflammait. Quand enfin, des hauteurs d’Emmaüs, ils virent la fameuse ville pour laquelle ils avaient tant souffert, ce fut un délire dont rien ne peut donner l’idée. Un même cri sortit de toutes les poitrines : Jérusalem ! Jérusalem ! Puis les croisés fondirent en larmes, et tombèrent à genoux, les mains tendues et baisant la terre.

On s’occupa aussitôt avec la plus grande activité des travaux du siège. Mais la ville était gardée par soixante mille Sarrazins. Elle résista pendant trente jours, et les croisés souffrirent beaucoup : une chaleur intense avait desséché le torrent du Cédron, et les citernes étaient