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pas de sitôt, » répond l’autre. Pendant qu’ils discouraient parut le corps des gardes. À cette vue, le Lombard, saisi d’effroi, s’écrie : « Pour le coup, c’est Charles. » — Non, répond Oger, pas encore. » À la suite viennent les évêques, les abbés et les comtes. Didier crie en sanglotant : « Descendons et cachons-nous dans les entrailles de la terre, loin de la face et de la fureur d’un si terrible ennemi. » Oger, tout tremblant aussi, dit alors : Quand vous verrez les champs se hérisser d’une moisson de fer, le sombre Pô et le Tessin inonder les murs de la ville de leurs flots noircis par le fer, alors vous pourrez croire à l’arrivée de Charles. » À peine avait-il dit ces paroles, qu’il s’élève au couchant un nuage qui change le jour en ténèbres. L’empereur approchant, l’éclat de ses armes fit luire pour les habitants de Pavie, un jour plus sinistre que la nuit. Alors, Charles paraît lui-même ; cet homme de fer avait la tête couverte d’un casque de fer et les mains garnies de gantelets de fer ; sa poitrine de fer et ses épaules de marbre étaient défendues pur une cuirasse de fer ; sa main gauche élevait en l’air une lance de fer ; sa main droite était posée sur son invincible épée ; ses cuissards étaient de fer, ses bottines de fer ; son cheval avait la couleur et la force de fer. Tous ceux qui précédaient le monarque, tous ceux qui marchaient à ses côtés, tous ceux qui le suivaient, tout le gros même de l’armée avaient des armures semblables. Le fer couvrait les champs et les chemins, les pointes de fer réfléchissaient les rayons du soleil, et ce fer si dur était porté par un peuple d’un cœur plus dur encore. » Voilà celui que vous cherchez avec tant de peine ! » s’écrie Oger ; et il tomba presque sans vie.

Après un long siège, les habitants, souffrant de la famine, obligèrent Didier à ouvrir les portes de sa capitale. L’infortuné prince se rendit lui-même, la tête couverte de cendres, à la tente du vainqueur. Celui-ci l’envoya à Liège, et le fit entrer dans un monastère. Charles mit sur sa tête la couronne de fer, et se fit sacrer roi des Lombards.

3. Expédition d’Espagne (778). — Charles fui alors appelé en Espagne, par des émirs révoltés. Il franchit les Pyrénées, et refoula les Maures au-delà de l’Ebre. Mais au retour, les Gascons et les Mahométans attaquèrent, dans le défilé de Roncevaux, l’arrière-garde des Francs, commandée, dit-on, par le plus fameux des paladins de