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Quand son absolu détachement de sa conservation propre, sa négligence hautaine pour ses intérêts immédiats et corporels lui fit appuyer, par mégarde, la main sur le revolver, la balle, en partant, tomba dans le sang du monde qui fut jamais le plus surchauffé par l’ardente passion de la vie publique. Son existence a été un torride et fulgurant été, un prodige de maturité soudaine. Porté en un moment au faîte de la popularité et de l’influence, il y a péri tout entier sans décroître. Il s’est éteint à son zénith, n’ayant presque pas connu le matin et n’ayant pas eu de soir.

Un million d’hommes s’est senti touché par sa mort, cent mille ont célébré ses funérailles, des milliers l’ont pleuré, comme on pleure, quand on est homme, sur le cercueil de sa mère ou de son enfant.

Certains ont prétendu que c’était faire tort à l’idée républicaine, que c’était manquer aux lois de l’esprit démocratique : leur philosophie est bien bornée. La France, sur ce grand sépulcre, où elle venait d’enfermer une partie si brillante de sa vie publique, a senti le besoin de proclamer son droit national et son immortalité. Elle s’est mise tout entière en mouve-