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Méprise le malheur, et vit dans la bassesse.
Tel est de mon pays le système maudit :
L’homme vertueux souffre, et l’intrigant jouit. »
Cependant du logis la charmante maîtresse,
Annonçant le festin, dissipe la tristesse ;
Et Comus et Bacchus semblent se disputer
Le droit de nous servir et de nous contenter.
Divers mets, préparés par des mains élégantes,
Sont offerts à nos yeux sous des formes charmantes,
Et l’assemblage heureux des vins les plus exquis
À nos yeux enchantés en relève le prix.
Mais près de nous survient l’agile Terpsichore :
Aussitôt sur ses pas chacun court et l’honnore.
« Hé quoi ! vous préférez un repas à ma cour !
Comment ! ne suis-je plus l’ame de ce séjour ?
Nous dit-elle : à mon art partout on rend hommage ;
J’égaie et j’embellis les charmes du bel âge,
Je fixe les plaisirs. Venez, jeunes beautés ;
Vous faites l’ornement de ces lieux enchantés ;
À commencer le bal c’est moi qui vous invite. »

À sa voix chacun court, vole, et se précipite.
Dans un riche salon, sous des lambris dorés,
Nous entrons, des Plaisirs et des Jeux entourés :
Tout respire la joie ; et la folle jeunesse
Se livre avec ardeur à la vive allégresse.
Aimables passe-tems, momens délicieux,
Comme un songe léger vous fuyez à nos yeux !
L’aube annonce le jour : alors dans son asile
Vole près d’un époux sa compagne tranquille,
Et la sensible mère, à ses tendres enfans
Prodiguant la douceur de ses embrassemens,
Regrette ces instans donnés à l’allégresse
Qui les avaient ravis à sa vive tendresse.