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Qu’à Pérouse la faim consume nos soldats ;
Que Modène offre encor son siège et ses combats ;
Que les rocs de Leucade entr’ouvrent nos galères ;
Que sous l’Etna brûlant renaissent d’autres guerres,
Qu’importe ; César règne, et le Tibre est heureux[1]
De l’acheter du sang de ses peuples nombreux.
César, quand, terminant ta carrière mortelle,
Tu prendras ton essor vers la voûte éternelle,
Les dieux te céderont leur rang et l’univers.
De l’Olympe déjà les palais sont ouverts ;
Si tu veux y régner prends le sceptre du monde.
Veux-tu donner le jour à la terre féconde ?
Sur son char enflammé remplace le soleil ;
Et la terre sans crainte attendra son réveil.
Mais ne va point régner vers ces zônes lointaines
D’où soufflent de l’Auster les humides haleines,
Ou que l’Ourse glacée obscurcit de brouillards ;
Rome n’aurait de toi que d’obliques regards,
Et l’Olympe verrait fléchir son axe immense :
Monte au sommet des cieux, et tiens-les en balance :
Là que jamais l’orage, altérant leur azur,
N’obscurcisse l’éclat de ton front toujours pur ;
Qu’alors la paix, brisant le glaive de la guerre,
Fasse un peuple d’amis des peuples de la terre,
Et renferme Janus sous ses portes d’airain.
Ô César ! sois mon dieu : si tu remplis mon sein,
Je n’invoquerai point le dieu de la Pythie,
Et laisserai Bacchus dans son île chérie ;
C’est assez de toi seul pour m’inspirer des chants.
— Ma voix va raconter ces grands évènemens ;

  1. Le ton de Virgile est bien différent dans son invocation à Auguste !