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DITHYRAMBE.

« Toi, dit-il, dont le doigt fit pencher pour la guerre
» Tes bassins éternels,
» Au bonheur des mortels
» Faut-il que ce fléau soit parfois nécessaire !
» Par ce sang pour la paix à regret répandu,
» Par ce sang espagnol au nôtre confondu,
» Par mes aïeux enfin, peuple, je vous conjure,
» Rois, je vous en supplie, oubliez toute injure ;
» C’est là ma récompense et tout ce qui m’est dû ! »

Il dit, et marche droit aux colonnes d’Hercule ;
L’hydre des factions devant ses pas recule ;
Dans les murs de Cadix il s’enferme indécis :
En vain sa gueule enflammée
D’une stérile fumée
Couvre le camp français sur le rivage assis ;
Devant nous la porte tombe,
Et le monstre qui succombe
De sa dernière écume outrage encor les lis.

C’est peu : pour contempler nos pompes triomphales,
Qu’à leur sang refusa le destin rigoureux,
Nos frères, moissonnés sous un chef moins heureux,
Du sommeil de la Mort rompant les lois fatales,
Se lèvent par milliers de leurs tombeaux poudreux,
Et, contens d’une gloire et si prompte et si belle,
Tous rentrent consolés dans la nuit éternelle !