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n’y avait aucun représentant. Ceux mêmes qui, étrangers à la politique ou adhérant à des groupements de droite, avaient été élus par les Soviets et les comités de l’armée en tant que « sans-parti », s’empressèrent, pour des motifs qui n’avaient rien de commun avec les intérêts de l’État, à s’affubler de l’étiquette socialiste et se fondirent avec les membres des divers partis. Les Comités exécutifs du Soviet de toutes les sessions furent de même exclusivement socialistes. Dans ces conditions, il était impossible de compter sur la modération de la démocratie révolutionnaire ni d’espérer maintenir le mouvement populaire dans les limites de la révolution bourgeoise. En fait, le gouvernail à moitié pourri du pouvoir se trouva entre les mains d’une coalition de socialistes-révolutionnaires et de social-démocrates mencheviks, la prépondérance appartenant, au commencement, au premier de ces partis et plus tard au deuxième. Au fond, c’est à cette coalition de partis strictement limitée qu’incombe la plus lourde responsabilité pour la marche ultérieure de la révolution russe (voir tableau ci-dessous).

  • Anarcho-communistes (3)
  • Socialistes :

+ Social-démocrates :

 – Bolcheviks (3)
 – Mencheviks :
   . Internationalistes (3)
   . Défensistes (1)
 – Epinstvo (1)

+ Populistes :

 – Social-révolutionnaires :
   . De gauche (3)
   . Du centre (3)
   . De droite (1)
 – Travaillistes (1)
  • Paysannerie (2)
  • Libéraux (1)

+ Constitutionnalistes démocrates (cadets) + Cadres démocrates

  • Sans parti (démocratie non socialiste, bourgeoisie, fonctionnaires ; officiers, etc)

+ Conservateurs

(1) Défensistes (2) Groupements en partie défensistes, en partie défaitistes (3) Défaitistes

La composition du Soviet était très hétérogène : intellectuels, petits-bourgeois, ouvriers, soldats, beaucoup de déserteurs… Au fond, les Soviets et les Congrès, surtout les premiers, présentaient une masse plutôt amorphe, sans aucune éducation politique ; aussi tout le travail, toute la direction et toute l’influence se concentrèrent-ils dans les comités exécutifs, composés presque exclusivement d’intellectuels socialistes. La critique la plus foudroyante du Comité Exécutif a été faite, au sein même de cette institution, par un de ses membres, V. Stankevitch : le désordre chaotique des séances, la désorganisation politique, le caractère vague, hâtif et fortuit des questions examinées, l’absence totale de toute expérience en matière d’administration et, enfin, la démagogie des membres du comité : l’un prônant l’anarchie dans les Izvestia, un autre envoyant de tous côtés des autorisations pour l’expropriation des propriétés foncières ; un troisième expliquant à une délégation militaire qui venait se plaindre des chefs, qu’il fallait les destituer, les arrêter, etc.

« Ce qui frappe dans la composition personnelle du comité, c’est la grande quantité d’éléments allogènes », écrit Stankevitch. « Les Juifs, les Géorgiens, les Lettons, les Polonais, les Lituaniens, étaient représentés en disproportion absolue avec leur nombre à Pétrograd et dans le pays. »

Voici la liste du premier Bureau du Comité Central Panrusse des Soviets des délégués des ouvriers et des soldats :

Tchéidzé : Géorgien. Gourvitch (Dan) : Juif. Goldman (Liber) : Juif.