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d’indignation dans les milieux révolutionnaires. Les commissaires et les Comités du front Nord envoyèrent à Pétrograd une série de dépêches pour démentir « les insinuations et les provocations du Grand Quartier Général » et pour affirmer que « cette défaite n’avait rien de honteux », que « les troupes exécutaient consciencieusement les ordres des chefs… il n’y avait eu, de la part des hommes, ni désertion, ni trahison. » Stankiévitch, commissaire du front, reconnaissait ce que cette retraite inexplicable et ignominieuse avait d’humiliant, mais il indiquait, en passant, nombre de fautes et d’imprudences commises par les dirigeants. Il dut y avoir, dans la direction des opérations, par le fait des personnes comme par le fait des circonstances, des erreurs, causées par la méfiance réciproque, par le déclin de l’obéissance et par le mauvais fonctionnement des services auxiliaires. Il n’en est pas moins certain que les troupes du front Nord et, en particulier, la 12ème armée, étaient les plus désorganisées de toutes ; la simple logique des événements voulait qu’elles fussent incapables d’opposer à l’ennemi la résistance nécessaire. L’apologiste de la 12ème armée, le commissaire Voïtzinsky, dont la tendance a toujours été d’exagérer les qualités militaires de ses troupes, télégraphia lui-même au Soviet de Pétrograd : « Les hommes manifestent de l’indécision, ils ne sont pas préparés à combattre ; le résultat en est qu’on manque de stabilité dans la guerre de campagne… Il y a des unités qui luttent avec vaillance comme aux premiers jours — il y en a d’autres qui sont fatiguées et qui sont enclines à la panique. »