un petit détail — mais il permet d’expliquer, dans leur origine, bien des manifestations de la « colère et de l’affliction des citoyens ». Les représentants des cours adressaient souvent au chef de l’état-major leurs prières et leurs réclamations. Un jour, leurs revendications se firent par trop violentes — il s’agissait d’une paire de bottes supplémentaire — Markov les éconduisit. Le lendemain, on lisait dans le journal : « Le Front », n° 25, la « motion votée par l’assemblée générale des étudiants aux cours pour agitateurs » : ils avaient pu se convaincre personnellement des mauvaises dispositions des états-majors à l’égard des députés élus par les soldats. Ils déclaraient qu’en leurs personnes aussi bien qu’en celles de leurs électeurs, le comité du front trouverait toute l’assistance nécessaire pour combattre la « contre-révolution », même s’il décidait d’avoir recours à « l’insurrection armée ».
Évidemment aucune collaboration n’était à envisager.
Le comité du front finit par adhérer à l’idée de l’offensive, mais il exigea la création de « commissions de contact » qui fonctionneraient pendant le combat. Ces commissions devaient se composer de membres du comité du front et des comités d’armée ; elles auraient le droit de participer à la préparation des opérations et de contrôler les faits et gestes des chefs et des états-majors, des troupes chargées d’exécuter les plans stratégiques ([1]). Je refusai, bien entendu. Mon refus créa de nouveaux embarras qui inquiétèrent fort le ministre de la guerre ; il envoya en toute hâte à Minsk son chef de cabinet, le colonel Baranovsky ([2]) et le commissaire aux armées Stankiévitch ([3]). Les amis de Baranovsky m’ont raconté, dans la suite, qu’on avait soulevé la question de ma révocation, ni plus ni moins, en considération de « mes graves malentendus avec le comité du front ».
Stankiévitch donna toute satisfaction au comité : les commissions de contact furent admises à fonctionner jusqu’au début de l’action, mais sans droit de contrôle, sans participation à la préparation de l’offensive.
Des trois généraux qui commandaient les armées, les comités en tenaient deux sous leur férule : on pouvait les laisser, temporairement, à leur poste, l’activité sur leurs secteurs étant nulle.
On préparait l’offensive sur le front tenu par la 10ème armée, commandée par le général Kisselevsky, dans le secteur de Molodetchno.
- ↑ Ce qu’il y avait de plus original dans cette combinaison, c’est que des représentants des ouvriers siégeaient aussi au comité du front ouest.
- ↑ Jeune colonel de l’État-major. Kérensky le consultait sur toutes les questions militaires.
- ↑ Il resta deux jours sur le front ouest, puis il fut appelé dans le nord. Kalinine vint le remplacer.