Page:Denikine - La décomposition de l'armée et du pouvoir, 1922.djvu/257

Cette page n’a pas encore été corrigée

d’une fois, de la lutte, blessé, ensanglanté »… C’est ce que la démocratie révolutionnaire n’a su ni comprendre, ni apprécier.

* * *


Bien différemment se comporta le congrès des officiers à Pétrograd (du 18 au 26 mai) qui avait réuni environ 700 délégués. Il s’y était formé deux camps distincts : d’un côté les officiers politiciens et les fonctionnaires de l’arrière ; de l’autre — un nombre peu considérable de véritables officiers de l’armée dont la participation au congrès était, en quelque sorte, un malentendu. Le Comité exécutif avait élaboré un programme se conformant strictement à l’usage fixé par les congrès soviétistes quant aux questions mises en discussion : 1) l’attitude envers le Gouvernement Provisoire et le Soviet ; 2) la question de la guerre ; 3) l’Assemblée constituante ; 4) la question ouvrière ; 5) la question agraire ; 6) la réorganisation de l’armée sur une base démocratique.

À Pétrograd, on exagéra l’importance du congrès et à son ouverture des membres du gouvernement russe et des gouvernements étrangers prononcèrent des discours solennels ; de la part du Soviet le congrès fut même salué par une allocution de Nahamkès. Dès le début, l’irréconciliable divergence des deux groupes se manifesta. Elle était inévitable, car même dans la question cardinale de l’ « ordre du jour numéro 1 », le vice-président du congrès, le capitaine Brjosek, émit l’opinion suivante : « sa promulgation était motivée par des nécessités historiques : le soldat avait été opprimé et il était de toute urgence de le libérer. » Cette déclaration fut accueillie par les applaudissements prolongés d’une partie de l’assemblée !

Après toute une série de séances orageuses, une résolution fut votée par 265 voix contre 216 qui affirmait que les « forces révolutionnaires du pays étant entre les mains des paysans, des ouvriers et des soldats organisés qui composent la plus grande partie de la population », le gouvernement devait être responsable devant le Soviet Panrusse.

Quant à la résolution sur la nécessité de l’offensive, elle recueillit les deux tiers des voix.

La déclaration (du 26 mai) du groupe qui, représentant réellement l’opinion de l’armée du front, affirmait la nécessité d’appuyer de toute manière le Gouvernement Provisoire, donne une explication à l’attitude prise par le congrès : « Le Comité exécutif du Soviet des députés officiers de Pétrograd, en convoquant le congrès, n’avait pas en vue la solution du problème pourtant d’une actualité si essentielle — la régénération de l’armée, car la question de la force combative de l’armée russe et des moyens propres à la relever, ne fut pas même inscrite au programme qui nous fut proposé ; cette question n’y fut introduite