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Le seul témoignage important est celui d’Eschine (Discours de l’ambassade, § 165). Eschine, se livrant à une violente invective contre Démosthène, lui reproche d’avoir trahi son client. « Tu as écrit, dit-il, un plaidoyer pour le banquier Phormion, tu te l’es fait payer, et ensuite tu l’as communiqué à Apollodore qui poursuivait Phormion et menaçait sa liberté. » Ce fait, s’il était vrai, pouvait avoir besoin d’explication, mais il pouvait être expliqué et justifié par les circonstances. Dans tous les cas, Eschine ne dit pas que Démosthène eût composé un plaidoyer pour Apollodore ; or, si Démosthène avait réellement commis cette mauvaise action, Eschine n’aurait pas manqué de le savoir et de le dire. Plutarque est le plus ancien auteur qui accuse Démosthène d’avoir plaidé le pour et le contre (Vie de Démosthène, ch. 14 ; Parallèle de Démosthène et de Cicéron, ch. 3). Mais Plutarque vivait quatre siècles après Démosthène. On sait combien il est dépourvu de critique. Son affirmation n’a probablement d’autre fondement que le mot d’Eschine mal compris, et l’habitude prise de lire les discours d’Apollodore dans le recueil des Œuvres de Démosthène. Les biographes postérieurs n’ont fait que copier Plutarque. La tradition sur ce point est donc absolument insuffisante, car le témoignage d’Eschine est plutôt favorable à Démosthène.

Au point de vue du style, les hellénistes trouvent une différence marquée entre les discours authentiques de Démosthène et ceux qui portent le nom d’Apollodore. Ils remarquent dans ces derniers le retour fréquent des mêmes mots et des mêmes tournures, l’allure pesante et embarrassée des périodes, l’accumulation des pronoms qui rend souvent le sens obscur ; enfin, à côté d’un talent réel d’exposition, une absence complète de vigueur dialectique et de mouvement oratoire. Mais il y a deux autres arguments qui nous paraissent décisifs. D’abord les plaidoyers contre Callippe, Timothée et Nicostrate, sont antérieurs aux plaidoyers de Démosthène contre ses tuteurs, et on ne peut pas supposer que Démosthène ait composé des plaidoyers à l’âge de quatorze ou quinze ans, ni