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TABLEAU DE LA LITTÉRATURE FRANÇAISE.

der en passant, mais où il ne saurait se plaire. À ses côtés pourtant est une jeune femme dont la décence et la grâce semble présager d’autres jours : Françoise d’Aubigné avait déjà l’esprit et le tact, mais non encore la froide réserve de Mme de Maintenon.

C’est ainsi que ces cercles élégants ou ingénieux s’appuyant, se suppléant, se succédant l’un à l’autre, conduisent l’histoire littéraire à travers la première moitié du siècle, jusqu’aux jours où ils viennent se fondre dans une seule et splendide société, qui réunit et représente toutes les gloires de la nation, la cour de Louis XIV.

Déjà sous Louis XIII un homme avait tenté et réalisé en partie cette union. Richelieu lui aussi eut son cercle lettré. Passionné pour les représentations dramatiques, c’est au théâtre, c’est à la tragédie, c’est-à-dire à la forme qui devait jeter le plus d’éclat sur notre poésie du XVIIe siècle, qu’il accorda sa faveur. Il fit plus encore : par une institution publique, il rassembla toute l’élite des gens de lettres dans une grande société recrutée par l’élection, et fonda, sous le nom d’Académie française, le plus nombreux, le plus illustre, le plus durable des cercles littéraires.

Nous suivrons, dans l’étude des auteurs de cette période, la classification que nous offrent les sociétés qu’ils fréquentent. Sans prétendre faire l’histoire de toutes ces mondaines réunions, nous esquisserons celles qui eurent sur la littérature l’influence la plus marquée, et nous rattacherons à leur souvenir l’appréciation des principales œuvres qu’elles ont vu naître.

Le premier et le plus célèbre des cercles élégants du XVIIe siècle fut le fameux hôtel de Rambouillet. Dès le règne de Henri IV, cette maison avait été un centre de conversations polies et ingénieuses. Bâtie par les Pisani, à quelques pas du Louvre et près de l’emplacement où devait