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Cette révolution économique était devenue inévitable bien avant la guerre, depuis le jour où ce que l’Europe avait donné aux autres pays de son propre esprit et de sa propre chair ne lui appartenait plus en propre. En fait, tout ce qui constituait sa supériorité, moyens d’exploiter le capital superficiel et souterrain de l’humanité, moyens de produire la richesse, moyens de la transporter et de la faire circuler, tout s’est vulgarisé, diffusé à travers le monde. La science qui a fourni l’arsenal des conquêtes humaines sur la nature n’est plus l’apanage de l’Europe ; elle l’a enseignée et propagée. « Cette denrée (le savoir), dit M. P. Valéry[1], se préparera sous des formes de plus en plus maniables ou comestibles ; elle se distribuera à une clientèle de plus en plus nombreuse ; elle deviendra chose de commerce, chose qui s’exporte, chose enfin qui s’imite et se produit un peu partout. »

Civilisation matérielle, méthodes de travail, tout se répand, se transmet, s’égalise par le monde ; dans cette œuvre de diffusion, il s’ac-

  1. P. Valéry, La crise de l’esprit. La Nouvelle Revue française, 1er août 1919, p. 335.