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riel et l’insurrection des métis

dans cette position mal fortifiée, l’évacuèrent et se retirèrent à Prince-Albert, d’où ils ne bougèrent plus de toute la campagne.

La nouvelle du soulèvement des Métis fut annoncée au Parlement d’Ottawa le 23 mars et fit l’effet d’un violent coup de tonnerre dans un ciel sans nuages. Les esprits troublés voyaient déjà une révolte générale des Peaux-Rouges. Rien n’était préparé pour la répression d’une insurrection que Riel, avec un coup d’œil remarquable, faisait éclater à cette époque de l’année où la fonte des neiges, qui dure généralement deux à trois semaines, rend les mouvements de troupes presque impossibles.

Le Canada n’ayant pas d’armée permanente, mais seulement des milices, il fallut mobiliser en toute hâte quelques bataillons. En y comprenant les armes spéciales, 5,000 hommes furent convoqués et transportés en moins d’un mois sur le théâtre des opérations.

Le général Middleton, désigné par le ministre de la milice, sir Adolphe Caron, pour diriger les opérations actives, se met en route dès le 24 pour Winnipeg, où il arrive le 27. Prenant avec lui le 90e bataillon (carabiniers de Winnipeg), qui avait été appelé sous les armes depuis quelques jours seulement, il se transporte aussitôt à Fort Qu’Appelle où il établit son quartier général, en attendant la concentration des troupes mobilisées. De ce point, il surveillait l’insurrection et, par sa présence, maintenait dans l’ordre les Sauvages, assez nombreux, qui avaient leurs réserves dans ces parages.

Le succès des Métis au Lac aux Canards avait été le signal d’un soulèvement des tribus indiennes de la Saskatchewan, travaillées depuis longtemps par Riel et ses émissaires. Riel n’ignorait pas qu’en appelant les Sauvages à la révolte, il donnait libre cours à tous leurs instincts féroces et sanguinaires ; mais il comptait sur son ascendant pour les maîtriser. Il n’en fut malheureusement rien, et, dès le début, se produisirent d’affreux massacres, qui enlevèrent à la cause des Métis les sympathies qu’elle pouvait avoir dans l’opinion.

Apprenant la nouvelle du premier engagement, le détachement de police à cheval qui se trouvait à la colonie du Lac aux Grenouilles se retira au fort Pitt, à 30 milles au sud, sur la demande même des blancs. Ceux-ci se croyaient plus en sûreté de cette façon, mais la tribu de Gros-Ours, dont la réserve ôtait voisine, se chargea de les