Page:Demanche - Au Canada et chez les Peaux-Rouges, 1890.djvu/147

Cette page a été validée par deux contributeurs.
riel et l’insurrection des métis

Le cabinet fédéral entra alors en négociations avec Riel, reconnaissant ainsi implicitement l’existence de son gouvernement, et une députation fut envoyée à Ottawa pour discuter les termes de l’arrangement à intervenir. À ce moment, le parti anglais tenta de renverser Riel. Ambroise Lépine, lieutenant de ce dernier, dispersa les opposants après avoir fait quelques prisonniers. L’un d’eux, Thomas Scott, orangiste d’Ontario, ayant tenté à deux reprises de s’évader avec violence, fut traduit devant une cour martiale, condamné à mort le 3 mars 1870 et exécuté le lendemain, sans qu’on ait eu le temps d’intervenir efficacement pour empêcher cet acte d’excessive rigueur.

Cette exécution souleva de vives animosités. Les Anglais l’appelèrent un assassinat et vouèrent à Riel, qui avait osé toucher à un des leurs, une de ces haines implacables dont les effets se firent encore sentir quinze ans après.

Le gouvernement fédéral, pour apaiser les Métis, avait eu l’habileté de rappeler en toute hâte dans son diocèse, Mgr Taché, qui se trouvait à Rome. En même temps, l’hiver était mis à profit pour organiser une colonne expéditionnaire qui, sous les ordres du colonel, depuis général Wolseley, devait rétablir l’ordre matériel. Mais Mgr Taché, dont l’influence était considérable, parvint à tout concilier et, lorsque la colonne Wolseley entra à Fort-Garry, après une marche aussi longue que difficile depuis Port-Arthur, l’ordre était rétabli. Les Métis avaient obtenu d’importantes satisfactions et étaient en droit de réclamer une concession de 240 acres par tête. La province de Manitoba était créée avec un parlement responsable et l’usage du français se trouvait légalement consacré. Mais Riel était exilé pour cinq ans — en février 1875 — et l’amnistie octroyée, le 25 avril de la même année, ne s’appliquait pas aux chefs du mouvement.

La tentative, bien qu’avortée, de Riel n’avait pas affaibli le prestige de celui-ci. Élu député du Manitoba, il avait eu la hardiesse de se rendre à Ottawa, en 1874, pour prendre possession de son siège ; mais, averti par ses amis qu’il ne s’y trouvait pas en sûreté, car le gouvernement d’Ontario avait promis 5,000 piastres pour sa capture, il consentit à s’éloigner en toute hâte et se retira momentanément aux États-Unis. Il se trouvait au Montana, en 1884, maître d’école dans une