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édition. Après tout, nous sommes fiers entre nous de notre livre qui restera, quoi qu’on fasse, en dépit des colères des journalistes ; et à ceux qui nous demanderaient : “Vous vous estimez donc beaucoup ?” nous répondrions volontiers, avec l’orgueil de l’abbé Maury : “Très peu quand nous nous considérons ; beaucoup quand nous nous comparons !”

« Il est bon toutefois d’être deux pour se soutenir contre de pareilles indifférences et de semblables dénis de succès ; il est bon d’être deux pour se promettre de violer la Fortune, quand on la voit coqueter avec tant d’impuissants.

« Peut-être, un jour, ces lignes que nous écrivons froidement, sans désespérance, apprendront-elles le courage à des travailleurs d’un autre siècle. Qu’ils sachent donc qu’après dix ans de travail, la publication de quinze volumes, tant de veilles, une si persévérante conscience, des succès même, une œuvre historique qui a déjà une place en Europe, après ce roman dans lequel nos ennemis mêmes reconnaissent “une forme magistrale”, il n’y a pas une gazette, une revue, petite ou grande, qui soit venue à nous ; et nous nous demandons si le prochain roman que nous publierons, nous ne serons pas encore obligés de le publier à nos frais ; et cela, quand les plus petits fureteurs d’érudition et les plus minces écrivailleurs de nouvelles sont édités, rémunérés, réimprimés. »