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ami, le fameux marchand de tableaux Gersaint, dont il avait fait l’enseigne, et d’Argenville, dans ses Vies des Peintres, avaient été presque seuls à parler de lui, et fort sommairement. Les comptes rendus de l’Académie royale de peinture et de sculpture constataient qu’à la mort du peintre des Fêtes galantes, le comte de Caylus qui l’avait connu et qui avait daigné l’honorer de son amitié, avait lu, le 3 février 1748, une notice biographique ; mais elle avait disparu des archives et le plus grand peintre de son temps n’avait pas d’histoire.

En furetant un jour, sous les arcades Colbert, à l’étalage du vieux bouquiniste Lefèvre, les Goncourt mirent la main sur un précieux registre qui renfermait ce document autographe portant les signes d’une incontestable authenticité, de par le visa apposé par Lépicié, secrétaire de l’Académie. Publiée in extenso dans leur second fascicule, cette vie de Watteau a pris maintenant la tête de leur livre et, savamment commentée, redressée quelquefois et complétée toujours, cette pièce, « pédante et agressive » mais pleine de faits, est devenue un des chapitres les plus curieux de l’Art du dix-huitième siècle.

Le Dictionnaire critique de Jal, les Archives et les Nouvelles archives de l’Art français, ont mis au jour un bien grand nombre de documents authentiques sur les contemporains de Watteau. Ils ont ajouté cependant bien peu d’éléments nouveaux aux recherches de toute sorte auxquelles les Goncourt s’étaient livrés avant de donner leur travail. En dehors de la solidité de ses dessous, il est particulièrement remarquable par la netteté et la précision. Chaque artiste a une physionomie différente, et les auteurs, adaptant leur faire au caractère de leurs modèles, ont parlé très différemment des Saint-Aubin, par exemple, et de Prud’hon. Devant le