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Ils ont fait de la Dauphine, au moment où la mort de Louis XV l’appelle au trône, le portrait que voici : « La Reine de France n’est plus la jolie ingénue de l’île du Rhin : elle est la Reine, une reine dans tout l’éclat, dans toute la fleur et toute la maturité, dans tout le triomphe et tout le rayonnement d’une beauté de reine. Elle possède tous les caractères et toutes les marques que l’imagination des hommes demande à la majesté de la femme : une bienveillance sereine, presque céleste, répandue sur tout son visage, une taille que Mme de Polignac disait avoir été faite pour un trône ; le diadème d’or pâle de ses cheveux blonds, ce teint, le plus blanc et le plus éclatant de tous les teints, le cou le plus beau, les plus belles épaules, des bras et des mains admirables, une marche harmonieuse et balancée, ce pas qui annonce les déesses dans les poèmes antiques, une manière royale et qu’elle seule avait de porter la tête, une caresse et une noblesse du regard qui enveloppaient une cour dans le salut de sa bonté, par toute sa personne enfin ce superbe et doux air de protection et d’accueil ; tant de dons, à leur point de perfection, donnaient à la Reine la dignité et la grâce, ce sourire et cette grandeur dont les étrangers emportaient le souvenir à travers l’Europe comme une vision et un éblouissement. »[1]

C’est là, sans doute, un des passages du livre que visait Sainte-Beuve quand, ayant à raconter les négociations du maréchal de Saxe, il s’excusait de ne point faire le portrait de la Dauphine « parce qu’on ne saurait être tenté de le recommencer après celui qu’ont magistralement tracé MM. de Goncourt. »

Sur Marie-Antoinette, ils écrivaient encore : « L’esprit de la Reine avait reçu de la nature, il avait acquis

  1. Éd. Charpentier, in-18, p. 117 et 173.