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On trouvera dans un volume in-8o devenu rare, qui a pour titre : Mystères des Théâtres, les articles de critique que les Goncourt et Cornélius Holff (autrement dit Charles de Villedeuil) écrivirent dans l’Éclair et dans le Paris. Débuts mousseux et pétillants, mais qui ont perdu un peu de leur jeunesse et de leur saveur à demeurer en livre depuis trente-cinq ans.

Les Goncourt, dès leur début, s’essayèrent aussi dans la critique d’art et l’Éclair publia des articles sur le Salon de 1852. Ils ont été réimprimés en volume par les soins de Michel Lévy, mais tirés à très petit nombre. C’est surtout un salon descriptif avec quelques morceaux brillants et des effets de fougue, à la Diderot. Devant la Sapho de Pradier les jeunes auteurs écrivaient : « Nous allions reprocher à cette Sapho d’être endormie en sa pose et de n’avoir rien de ce lascif, de ce palpitant amoureux, l’ὑγρόν des Grecs ! Pradier est mort hier, à onze heures du soir, à Bougival… Devant la mort, ce ne sont plus les œuvres qu’il faut voir, c’est l’œuvre, et celle de Pradier a toujours été vivante de chair. Elle a toujours consulté l’antique et toujours elle a été moderne ! Ç’a été, tout le long de jours doucement glorieux, des nymphes, des divinités sourieuses, des muses aimables ; mais toujours d’un mouvement antique il faisait une désinvolture contemporaine[1], et les plus belles et les mieux prises en leur gentil corps de notre temps se pouvaient reconnaître en la frise enchantée du facile Polyclète… Dans toute son œuvre, les poésies légères sont couronnées de fleurs et frappent du pied la terre… Comme en un chœur antique,

  1. C’est l’idée que Préault exprimait avec plus d’âpreté, quand, dans un article de la Renaissance, il écrivait de son confrère Pradier : « Il partait tous les matins pour Athènes et le soir arrivait rue Bréda ! » Voir Histoire des artistes vivants, par Th. Silvestre, in-4o, p. 284.