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l’Enfance d’une Parisienne, des Impressions de nature et d’art, des Enfants et Mères. Le bon médailliste Théodore de Banville, dans ses Camées parisiens, a fait de Mme Alphonse Daudet un portrait ressemblant : « Sur ses calmes traits se reflète une vigilante et profonde pensée. Les cheveux, très noirs et brillants, sont plantés bas sur un front assez large. Les sourcils noirs, très marqués, sont presque droits et tendent à se joindre. Les yeux noirs, fendus en amande, souriants et humides, s’ouvrent peu, et coulent le regard entre de longs cils recourbés. Le nez très busqué, aux narines remontantes, le teint brun, légèrement animé et les pommettes saillantes donnent au visage un caractère d’étrangeté sans lequel ne saurait exister la beauté moderne. La bouche, aux lèvres rouges, s’ouvre en arc très prononcé, et montre de courtes dents éclatantes de blancheur, enchâssées dans des gencives vermeilles. Le sourire est réservé, un peu contraint même, comme s’il craignait de laisser voir, dans sa clarté rose, le vif rayon de l’esprit qui, dans le monde, doit rester dissimulé et voilé, pareil à ces diamants entrevus sous le flot discret d’une gaze vaguement transparente. »

Le nom de Mme Alphonse Daudet apparaît donc, pour la première fois, en 1874, dans une longue suite de lettres où se montre un Goncourt nouveau, paternel et tendre, gouailleur et ému, qui unit les deux époux qui pourraient être ses enfants, dans un même sentiment d’affection. Dans le grand appartement de la place Royale qu’ils habitaient alors et qui devait servir de cadre à une des maîtresses scènes de Numa Roumestan, l’accueil, cordial et franc pour tous, se nuançait pour lui de tendre empressement et d’admiration ; il retrouvait un foyer ami où il détendait ses