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complètement, quand il se plaignait d’avoir, dans la tête, des choses qui lui faisaient mal, demandait à Dinah de le peigner. La femme de chambre le peignait au peigne fin, et, pendant qu’elle le peignait, voyant sa tête ne plus se soutenir, s’affaisser, tomber, elle lui demandait ce qu’il avait, s’il souffrait toujours. De Nittis lui répondait avec des soupirs douloureux en se touchant le front, puis, tout à coup, s’écriait : « Ah ! ah !… j’ai un vide dans la tête… je me meurs ! »

Dinah portait le mourant sur son lit où il ne parlait plus, n’ouvrait plus les yeux, avait seulement des contractions nerveuses des bras et des mains qui s’attachaient furieusement au corps de celle qui le soignait. Le médecin n’arrivant pas, un interne de l’hôpital, mandé par un voisin, déclarait qu’il avait déjà le côté gauche paralysé. C’était une hémiplégie, une congestion cérébrale, et tout était fini, après une horrible sueur froide qui le trempait des pieds à la tête en une demi-heure. L’embaumement nous apprenait qu’une congestion pulmonaire s’était produite en même temps ou avant la congestion cérébrale.

Amitiés,
Edmond de Goncourt.

Un artiste d’une sincérité qui ne peut pas être mise en doute, M. Frantz Jourdain, qui a beaucoup connu Jules Vallès, vient de donner de lui un portrait bien inattendu, dans un livre curieux qui a pour titre : Beaumignon. L’auteur révèle au public un Vallès tendre et timide, souffrant de toutes les délicatesses du cœur, ayant pleuré huit jours, dans une solitude complète, un père qui, méchamment et sans motif, l’avait fait enfermer dans une maison de fous.

Ce n’est pas ce Vallès-là que nous avons connu. Celui qu’il nous a été donné de rencontrer était un personnage farouche, exagéré, haineux et violent, à l’état chronique. C’est tout le contraire de ce que dit de lui M. Frantz Jourdain, mais ce contraire s’accorde, malheureusement pour le modèle, avec le caractère de son œuvre littéraire et avec la conduite qu’il a tenue dans ce qu’il croyait être de la politique. Le bon