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aux esprits libres

dans une trentaine de pages et que M. *** les a délayés dans un fort volume in-12. Mais les expressions modernes, mais les mots pittoresques, nés d’hier, qui servent d’étiquettes aux choses de la coucherie, de l’amour et de la polissonnerie, qui a eu la patience de les colliger et le courage de les nomenclaturer  ? Personne. La littérature contemporaine compte assurément nombre d’excellents esprits très dignes de mener à heureuse fin une œuvre de l’importance et de la nature de celle-ci  : il n’en est pas un seul qui ait osé emboucher le clairon de l’émancipation, pas un qui soit parvenu à se démailloter, à se débarrasser de ses langes et de ses lisières. Ce sont en effet de si grands seigneurs que les préjugés  ! de si grandes dames, les conventions  ! Songez donc  : appeler les choses par leur nom, — la grosse affaire  !

Pour moi, qui n’ai pas la vaine superstition du langage, et qui, au contraire, possède au suprême degré la haine, presque le dégoût de la feuille de vigne que les hypocrites placent sur leurs discours — comme les vieilles femmes un couvercle sur leur pot de chambre, — j’aborde résolument le taureau par les cornes, et j’essaie de faire, à mes risques et périls, ce que personne jusqu’ici n’a eu le courage de tenter. Car il est bien entendu que je compte pour rien le prétendu Glossaire érotique de la langue française de M.***, à qui une pudeur inexplicable a fait prendre la précaution — inutile — de s’abriter derrière un pseudonyme.

Ce qui m’a guidé dans cette intéressante besogne, à laquelle j’ai consacré de nombreuses veilles et pour laquelle je ne demande aucune récompense, — m’en étant déjà décerné une à moi-même, — ce n’a pas été de donner satisfac-