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toutes les sortes : il y eut des insurrections armées, qui sont l’espèce la plus connue ; des insurrections de palais, comme la Russie en a donné le modèle ; des insurrections de Sénat, qui sont un genre tout à fait nouveau. Les questions de politique pure et les questions personnelles remportaient sur le reste.

Enfin arrivèrent les malheurs du mois d’avril 1848, dans lesquels le pays perdit un si grand nombre d’hommes distingués, de citoyens dont il avait le plus grand besoin. La forme républicaine, à la faveur de ces événements terribles, disparut ; une monarchie fut éle­vée à Port-au-Prince, et le président Soulouque, rele­vant la couronne de Dessalines, devint l’empereur Faustin Ier.

Ce gouvernement impérial, dont le caractère était la violence et qui régnait par la terreur, avait toute la puissance qu’il fallait pour entreprendre les réformes, les innovations administratives qui peuvent, seules, chan­ger la face du pays, le faire prospérer. Ce gouverne­ment était absolu ; il était obéi au geste ; il dura en tout dix longues années ; et il n’entreprit rien, absolument rien, pour relever la production agricole de ce sol si facile, si libéral.

La population tremblait sous le joug d’airain qui pe­sait sur elle. Un silence effaré régnait partout. Un ordre muet, né de la stupeur, avait, succédé aux agitations politiques. Chacun s’appliquait à se faire petit. Tout le monde baissait la tête et se taisait, même dans l’inté­rieur de la famille. L’obéissance était complète. Tous-